Cher François,
Vous voilà empêtré dans cette discussion de cordon sanitaire avec vos camarades Paul, Maxime, Jean-Marc et quelques autres. On se croirait dans un film de Claude Sautet, mais nous sommes dans la politique belge des années 2020. A l’heure de la guerre en Ukraine, de la hausse des prix qui touchent les Belges et des fusillades dans la commune « où l’on ne peut plus dire qu’on ne se sent plus en Belgique », votre sujet de conversation est donc d’établir quels partis il importe d’ostraciser.
Quand nous avons suggéré qu’il faudrait aussi placer un cordon sanitaire autour des partis traditionnels, bien en peine lorsqu’il s’agit d’exclure leurs élus compagnonant avec l’islamisme (le vrai fascisme de notre siècle), et autour du vôtre, vous avez eu, sans doute fier de vous, des propos peu amènes à notre égard. Disons qu’à défaut d’être un procédé élégant entre démocrates – à supposer que vous l’êtes -, c’est de bonne guerre.
L’ « extrême droite la plus bête du monde », comme donc vous nous qualifiez, répondra au président-philosophe que le politiquement correct dont vous êtes le héraut n’est rien d’autre qu’une actualisation de la moraline disséquée par Friedrich Nietzsche. Plus en capacité morale et intellectuelle de défendre votre identité, fruit de siècles de développements, vous vouez une haine jalouse aux téméraires qui ont à coeur de perpétuer les traditions (c’est-à-dire ce que, dans votre jargon, vous appelez l’extrême droite).
En même temps, vous embrassez les causes qui amèneront à la destruction de nos modes de vie : il ne faut pas comprendre autrement votre volonté de régulariser l’ensemble des illégaux (que nous voulons expulser) ou de renier la laïcité pour complaire à une croyance venue d’ailleurs. Le tout saupoudré d’un ersatz de philosophie et d’un sourire infatué remplaçant votre moue déconfite de président d’un parti en soins palliatifs.
Bien sûr, nous n’aimons pas tirer sur des ambulances, mais vous avouerez que votre phalange ne représente pas l’avenir, contrairement à celles que vous tentez de bannir. L’auteur de ces lignes se remémore ses années de jeunesse où, passionné par la chose politique et habitant en périphérie bruxelloise, il se pressait aux rassemblements d’un FDF rugissant, où les drapeaux amarante se mêlaient aux étendards jaunes frappés du lion noir dans une mêlée inamicale. A l’époque, Olivier Maingain, de sa morgue de notaire de province utilisant un français tout droit venu du siècle des Lumières, morigénait les Flamands en les taxant de racisme et de fascisme.
Rien n’a vraiment changé, sauf que le FDF est devenu Défi, qu’il est désormais libéral-social, ou social-libéral, ou humaniste, et forcément écologiste, qu’il tente de survivre comme la guêpe – aux mêmes couleurs que la Flandre – emprisonnée dans un verre sur lequel on aurait posé un carton.
Le Bruxellois et le Wallon, heureusement, ont appris à déjouer les discours des sophistes et ont bien compris que Défi était sans doute « le parti le plus inutile du monde ». Mais peut-être aurez-vous envie de briser le cordon sanitaire et de discuter avec nous, de philosophie, de politique internationale, de la situation en Wallonie ? Vous y trouverez certainement plus d’intérêt qu’à écouter les louanges des quelques admirateurs qui composent encore votre parti et des trois ou quatre commentateurs sur vos réseaux sociaux.
« Il y a deux façons de se tromper : l’une est de croire ce qui n’est pas ; l’autre de refuser de croire ce qui est. » On vous conseillerait de méditer cet aphorisme d’un philosophe danois, seule chance pour votre parti de ne pas voir l’ambulance se transformer en corbillard.
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